9e Journée TechniqueL’éco-conception en pratique

Web-conférence

Edouard Jounet

« D’abord, récupérer l’énergie perdue sur le site »

Edouard Jounet, président de CertiNergy & Solutions, filiale d’Engie spécialisée dans l’efficacité énergétique, détaille ici la façon de mener et financer des opérations d’économies d’énergie. L’intervention sera assurée lors de la conférence par Mathias Welschbillig, directeur innovation.

Quelles sont les solutions énergétiques les plus adaptées à la filière fromagère ?
EJ : Avant de songer à changer de sources d’énergie, la première approche à privilégier est de voir dans quelle mesure l’entreprise peut auto-produire l’énergie qu’elle consomme, tirer parti de ses propres caractéristiques. Les entreprises fromagères ont la particularité d’avoir simultanément des besoins en chaleur et en froid. Des technologies fiables et efficaces permettent aujourd’hui de récupérer de la "chaleur fatale" pour produire du froid, surtout si les besoins en froid portent sur des plages de température relativement douces comme c’est le cas dans des caves d’affinage.
Faire du froid avec de la chaleur fatale excédentaire peut permettre de baisser sa facture énergétique de production de froid de 90%. Bien sûr, on n’arrivera pas à se passer d’intrants énergétiques, mais on peut grandement baisser leur besoin en s’inscrivant dans une logique d’économie circulaire à l’échelle du site.
Ensuite, dans une optique plus environnementale, on peut chercher à se passer des énergies fossiles, à décarboner son mix énergétique en remplaçant, par exemple, sa chaudière fioul avec des solutions présentées dans le cadre du Plan France Relance.

Pour les entreprises, l’enjeu est de faire baisser leurs charges mais aussi de pouvoir financer ce type de chantiers. Quels sont les dispositifs mobilisables ?
EJ : Le levier principal, ce sont les CEE (certificats d’économies d’énergie), un système parfaitement normé et rodé, qui constitue le fondement de notre activité. De facto, l’Etat et les fournisseurs d’énergie jouent une sorte de rôle de banquier en donnant des garanties financières aux industriels à travers les primes CEE qu’ils s’engagent à leur verser en cas de réalisation des travaux, comme nous l’avons fait chez Réo.
Mais il existe aussi les Contrats de performance énergétique (CPE) pour les chantiers où les retours sur investissement sont plus longs, ces contrats portant en moyenne sur 5 à 7 ans. La philosophie est différente : c’est nous qui nous engageons sur la performance future. Notre rétribution est indexée sur les économies réalisées, nous partageons avec l’entreprise le fruit des gains obtenus.
C’est un outil qui peut être très intéressant pour des petites PME qui n’ont pas forcément de grosses capacités d’investissement. L’enjeu pour nous est de nous assurer de leur pérennité, c’est une prise de risque. Pour l’industriel, c’est un outil qui permet de garantir que l’investissement génère effectivement des économies d’énergie, qui sont mesurées dans la durée, et donc qui contribuent à sa compétitivité.
L’un de nos atouts est de bien connaître la réglementation et ses opportunités. Jusqu’à peu, par exemple, il était très intéressant de récupérer la chaleur dégagée par les compresseurs des groupes froids grâce aux CEE, cela pouvait être très rentable et permettait de financer d’autres opérations.

Quelles sont les technologies émergentes ?
EJ : J’évoquerai, lors de la conférence, la "chaleur thermique solaire à concentration", qui est encore trop méconnue, ainsi que les techniques d’optimisation et et de régulation de la répartition des fluides.
Je parlerai également de froid durable et de notre solution d’optimisation « OCP » qui est aujourd’hui en place sur plus de plus de 50 sites industriels en France et à l’international.

Quelles gains peuvent espérer les entreprises ?
EJ : Quand l’usine est récente, on arrive à faire baisser sa facture énergétique de 10 à 15% . Quand elle est plus ancienne, on peut viser 40 à 45%. ◼